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  • Inspirations

    1. Jeux pour enfants, Les Simonnet, 1960.
    2. Stylisme futuriste, Pierre Cardin, circa 1960.
    3. Abris-bus, Ursula Schulz-Dornburg, circa 2000.
    4. La Farnsworth house, Mies van der Rohe, 1951.
    5. 101 Spring Street, Donald Judd, 1989.
    6. Chateaux d'eau, Bernd & Hilla Becher, 1988.
    7. The Continuous Monument, Natalini & Toraldo di Francia, 1969.
    8. La Maison des Canoës, Oscar Niemeyer, 1951.
    9. L'avant-garde publicitaire, Guy Bourdin, circa 1970.
    10. Le Tombeau Brion, Carlo Scarpa, 1978.
    11. Seascapes, Hiroshi Sugimoto, 1980.
    12. Le Jardin, Isamu Noguchi, 1959.

    Jeux pour enfants, Les Simonnet, 1960.

    Le duo d’artistes Les Simonnet, composé de Pierre et Annie Simonnet, s’est imposé dans le paysage artistique français par une œuvre singulière mêlant sculpture, design et art ludique. Leur particularité : concevoir des sculptures monumentales qui prennent la forme de jeux pour enfants, à la croisée de l’art et du mobilier urbain.

    Travaillant depuis les années 1960, Les Simonnet se sont intéressés très tôt à la relation entre art et quotidien, notamment en intégrant l’enfant comme acteur central de l’espace public. Pour eux, l’art ne doit pas seulement être contemplatif, il peut et doit être manipulé, exploré, vécu. Leur travail se distingue ainsi par une forte dimension pédagogique et sociale, qui s’inscrit dans une volonté d’ouvrir l’art à tous. Leurs sculptures, souvent colorées, arrondies et modulables, sont pensées pour éveiller l’imagination, la curiosité et la motricité. Inspirés par les formes géométriques simples, les volumes souples et les matériaux résistants, ils ont conçu de nombreux modules ludiques installés dans des écoles, des crèches ou des places publiques, notamment en France dans les années 1970 et 1980. Ces œuvres transforment les aires de jeux en véritables espaces d’expérimentation artistique, tout en respectant les besoins et les rêves des enfants.

    À travers leurs créations, Les Simonnet posent une question essentielle : et si le jeu était une forme d’expression artistique à part entière ? En brouillant les frontières entre sculpture et jeu, entre œuvre d’art et mobilier urbain, ils ont contribué à renouveler profondément notre regard sur l’art dans l’espace public.

    Stylisme futuriste, Pierre Cardin, circa 1960.

    Pierre Cardin a marqué l’histoire de la mode par une vision résolument tournée vers l’avenir. Précurseur du style futuriste dès les années 1960, il a cassé les codes traditionnels de la haute couture avec des formes géométriques audacieuses, des matières nouvelles comme le vinyle ou le plastique, et une esthétique inspirée par la conquête spatiale. Sa mode unisexe, fonctionnelle et architecturale rompait avec les conventions, affirmant une liberté créative rare pour l’époque. Mais Pierre Cardin, c’est aussi un maître de la communication. Premier couturier à faire défiler ses modèles hors des capitales de la mode, de Moscou à Pékin, il a su exporter son image à l’international bien avant ses contemporains. Il a compris l’importance du nom comme marque, apposant sa signature sur une multitude de produits, de la mode au mobilier, en passant par les parfums. Une stratégie novatrice qui a renforcé la puissance de son univers.

    Ses modèles, souvent avant-gardistes, ont incarné une modernité radicale et visionnaire. Ils restent aujourd’hui emblématiques d’une époque où la mode devenait un langage de rupture, d’innovation et d’expression individuelle. Pierre Cardin n’a pas seulement habillé son temps : il l’a devancé.

    Abris-bus, Ursula Schulz-Dornburg, circa 2000.

    Ursula Schulz-Dornburg est une photographe allemande née en 1938, connue pour son approche conceptuelle et documentaire de l’architecture et du paysage. Parmi ses œuvres les plus marquantes figure sa série sur les abris-bus brutalistes d’Arménie, réalisée dans les années 2000. Cette série met en lumière des structures aux formes insolites et sculpturales, vestiges d’un modernisme soviétique à la fois utopique et fonctionnel. Ces abris, conçus entre les années 1960 et 1980, témoignent d’une liberté formelle surprenante pour des constructions publiques. En les photographiant, Schulz-Dornburg ne se contente pas d’enregistrer une réalité architecturale ; elle révèle un monde en disparition, empreint d’étrangeté et de poésie. Isolées dans des paysages arides ou en bord de route, ces micro-architectures deviennent les symboles silencieux d’un passé révolu, d’une idéologie effondrée.

    Son travail, toujours sobre et précis, capte la tension entre permanence et abandon, entre utopie et ruine, tout en posant un regard critique sur la mémoire des lieux. La série des abris-bus s’inscrit ainsi dans une réflexion plus large sur le temps, l’espace et l’oubli.

    La Farnsworth house, Mies van der Rohe, 1951.

    La Farnsworth House, conçue entre 1945 et 1951 par l’architecte allemand Ludwig Mies van der Rohe,    est l’un des chefs-d’œuvre du mouvement moderne. Située à Plano, dans l’Illinois (États-Unis), cette maison incarne l’idéal minimaliste de Mies résumé par sa célèbre maxime : "Less is more". Commandée par la docteure Edith Farnsworth, la maison est pensée comme une résidence de week-end. Elle s’inscrit dans un dialogue profond avec son environnement naturel. Surélevée au-dessus du sol pour échapper aux crues fréquentes de la rivière Fox, la structure repose sur huit piliers d’acier, laissant la maison "flotter" au-dessus du sol. Son architecture se distingue par sa radicale simplicité : un plan ouvert, une structure en acier peint en blanc, de larges baies vitrées sur toutes les faces, et un seul volume intérieur. Cette transparence totale crée une continuité entre l’intérieur et l’extérieur, abolissant la frontière entre l’homme et la nature. La Farnsworth House est une illustration magistrale du langage architectural moderniste : rationalité structurelle, dépouillement formel, honnêteté des matériaux. Pourtant, derrière sa pureté géométrique, la maison a aussi suscité des controverses, notamment sur son habitabilité. Exposée aux regards, aux intempéries et aux inondations, elle interroge sur le confort et la vie privée dans une architecture aussi radicale.

    Aujourd’hui, la Farnsworth House est un monument historique classé et un lieu de pèlerinage pour les amateurs d’architecture. Elle continue d’inspirer les architectes et de nourrir la réflexion sur le lien entre esthétique, espace et vie humaine.

    101 Spring Street, Donald Judd, 1989.

    Pour Donald Judd, figure emblématique du minimalisme, l’habitation n’est pas simplement un lieu de vie, mais une extension directe de la pensée. Dans ses écrits comme dans ses réalisations à Marfa, au Texas, il conçoit l’espace comme un tout cohérent, où chaque élément - meuble, lumière, volume- doit répondre à un besoin clair, sans ornement ni superflu. L'habitat devient alors un manifeste silencieux : un lieu où la forme suit la fonction, où l’harmonie naît de la justesse.

    Sa philosophie repose sur la simplicité, non pas comme un appauvrissement, mais comme un affinement. Éliminer le décoratif, c’est retrouver l’essentiel. La simplicité chez Judd n’est jamais vide : elle est pleine de sens, d’attention, de précision. Dans ses espaces, l’habitation devient un acte de présence consciente — une manière d’habiter le monde avec lucidité et rigueur.

     

    Chateaux d'eau, Bernd & Hilla Becher, 1988.

    Bernd & Hilla Becher, couple de photographes allemands, ont consacré leur œuvre à la photographie d’architectures industrielles, notamment les châteaux d’eau. Leur démarche, à la fois artistique et documentaire, repose sur une grande rigueur méthodologique. Ils photographient ces structures de manière frontale, sous une lumière neutre, en éliminant toute subjectivité pour se concentrer sur la forme. Leur objectif n’est pas de produire des images isolées, mais des séries comparatives, ou « typologies », qui révèlent les différences et similitudes entre des objets de même fonction.

    Chaque série devient un tableau silencieux de l’architecture industrielle, où la répétition et la variation construisent un langage visuel. À travers cette approche systématique, les Becher transforment des éléments utilitaires en véritables sculptures anonymes, inscrivant leur travail dans l’art conceptuel tout en conservant une valeur documentaire.

    The Continuous Monument, Natalini & Toraldo di Francia, 1969.

    Superstudio est un collectif d’architectes italiens fondé en 1966 à Florence par Adolfo Natalini et Cristiano Toraldo di Francia. Issu du mouvement radical italien, le groupe remet en question l’architecture traditionnelle en dénonçant son rôle dans la consommation et l’urbanisation sans limite. Plutôt que de construire des bâtiments, ils produisent des projets conceptuels, des collages et des films qui imaginent des paysages futuristes et souvent dystopiques.

    The Continuous Monument, représente une immense grille géométrique recouvrant la planète, symbole d’une architecture totale et absurde. Par ces visions critiques, Superstudio cherche moins à proposer des solutions qu’à provoquer une réflexion : et si la véritable architecture était celle des idées plutôt que des objets ?

    La Maison des Canoës, Oscar Niemeyer, 1951.

    La résidence privée qu'Oscar Niemeyer s'est créée est la Maison des Canoës (Casa das Canoas), qui deviendra plus tard le siège de la Fondation Oscar Niemeyer. La Casa das Canoas à Rio de Janeiro a été conçue par Oscar Niemeyer en 1951. Elle a servi de maison familiale jusqu'en 1965, année où il a dû abandonner le Brésil en raison de la dictature militaire. En utilisant l'érotisme tropical comme langage de construction, Niemeyer a déconstruit le langage de l'architecture moderne fonctionnaliste : le toit plat incurvé soutenu par des colonnes d'acier léger et les murs de verre transparents font disparaître la maison dans la jungle tropicale.

    L'avant-garde publicitaire, Guy Bourdin, circa 1970.

    Guy Bourdin, figure majeure de la photographie de mode du XXᵉ siècle, a bouleversé les codes de l’image publicitaire. Provocateur et visionnaire, il refuse la simple mise en valeur du produit : pour lui, l’accessoire n’est qu’un prétexte à raconter une histoire. Ses compositions, souvent teintées d’érotisme et de mystère, mêlent beauté et inquiétude, séduction et malaise. Chaque image est pensée comme une œuvre autonome, où la mise en scène rivalise avec la peinture et le cinéma.

    En détournant la publicité de sa fonction première, Bourdin a fait de la photographie commerciale un véritable terrain d’expérimentation artistique. Ses campagnes pour Charles Jourdan ou Vogue ne vendent pas seulement des chaussures ou des vêtements : elles captivent, dérangent, fascinent. Grâce à son sens aigu de la narration visuelle, il impose l’idée que la photographie publicitaire peut dépasser le marketing et devenir art à part entière.

    Le Tombeau Brion, Carlo Scarpa, 1978.

    Le Tombeau Brion, également appelé Cimetière Brion, est un monument funéraire situé à San Vito d’Altivole en Italie. Conçu par l’architecte italien Carlo Scarpa entre 1968 et 1978, ce lieu est destiné à accueillir la mémoire de la famille Brion. Plus qu’un simple cimetière, il s’agit d’un espace poétique et symbolique qui allie harmonieusement architecture, nature et émotion. Scarpa crée un véritable dialogue entre les éléments naturels et architecturaux. L’eau, omniprésente sous forme de bassins, de canaux et de miroirs, apporte une dimension méditative et réflexive, invitant le visiteur à la contemplation. Les matériaux choisis - béton, bois, pierre et métal - sont travaillés avec une grande finesse, témoignant de l’attention portée aux détails, caractéristique du style de Scarpa. L’architecture du Tombeau Brion mêle modernité et tradition. L’œuvre s’inspire des jardins japonais et des mausolées antiques, tout en adoptant un langage contemporain unique. Les formes géométriques, les jeux d’ombre et de lumière, ainsi que le parcours entre les différents espaces, créent un véritable chemin initiatique. Chaque élément est chargé de symbolisme, évoquant la vie, la mort, la mémoire et le passage du temps.

    Le Tombeau Brion est reconnu comme une œuvre majeure de l’architecture funéraire du XXè siècle. Il illustre parfaitement la capacité de Carlo Scarpa à transformer un lieu de recueillement en une expérience sensible et poétique. À travers cette œuvre, l’architecture devient un vecteur d’émotion, où la mémoire se mêle à la beauté et à la sérénité.

    Seascapes, Hiroshi Sugimoto, 1980.

    La série Seascapes de Hiroshi Sugimoto incarne une quête de pureté visuelle et de méditation temporelle. Chaque photographie se compose de deux éléments fondamentaux - la mer et le ciel - séparés par une ligne d’horizon rigoureusement droite. Cette simplicité formelle extrême, presque austère, révèle une profonde rigueur dans la composition et la technique : temps de pose long, cadrage parfaitement symétrique, absence de tout élément narratif ou distrayant.

    Sugimoto capte ici l’intemporel, comme si ces paysages marins - figés dans leur calme éternel - étaient les mêmes qu’auraient pu contempler les premiers hommes. Dans cette série, la photographie devient un exercice de dépouillement et de contemplation, où chaque image semble suspendue hors du temps. Par la répétition du motif et la constance du regard, Sugimoto propose une méditation visuelle sur la permanence, la mémoire, et la perception.

    Le Jardin, Isamu Noguchi, 1959.

    Isamu Noguchi, sculpteur nippo-américain au parcours cosmopolite, a développé une relation intime avec la matière, et tout particulièrement avec la pierre. Cette connexion profonde s’est révélée de manière singulière dans le village de Mure, situé sur l’île de Shikoku, au Japon. Mure, célèbre pour son granit gris clair extrait des montagnes de la région, est devenu pour Noguchi un lieu de création essentiel, presque spirituel. C’est dans les années 1960 qu’il découvre Mure, et il y établit peu à peu un atelier à ciel ouvert, au pied du mont Ojigatake. Fasciné par la densité, la texture et la noblesse de la pierre locale, Noguchi s'entoure d’artisans tailleurs de pierre, dont le savoir-faire ancestral nourrit son propre langage sculptural. Il n’est pas question pour lui de dominer la matière, mais plutôt de collaborer avec elle, d’en révéler la forme intérieure, comme si chaque bloc de granit renfermait un secret à dévoiler.

    À Mure, la pratique de Noguchi prend une tournure à la fois plus méditative et monumentale. Il y sculpte des œuvres où l’équilibre entre forme et matière, entre plein et vide, exprime une profonde quête d’harmonie. Son approche reste fidèle à la philosophie zen, influencée par la nature et le temps : la pierre, marquée par les siècles, devient un médium vivant, transformé sans jamais être trahi.

    Ce lieu de travail deviendra plus tard le Isamu Noguchi Garden Museum Japan, un espace préservé, où ses sculptures dialoguent avec les éléments naturels – arbres, rochers, lumière – dans un équilibre subtil entre architecture et paysage. Mure n’est pas seulement un site de production : c’est un lieu de contemplation, où la lenteur du travail de la pierre fait écho à une réflexion sur la permanence, la mémoire et la beauté silencieuse des formes.